Élever nos enfants dans le bon sens du terme c’est à dire pour les mener plus haut, c’est le credo de Charlotte du site Cool Parents Make Happy Kids (les parents cools font des enfants heureux).
Découverte de cette nouvelle vague de pères et de mères qui refusent les fessés, les punitions à répétitions et les cris qui envahissent les maisons parce qu’ils croient fermement que cela fera plus tard des adultes à leur tour peu épanouis.
Sur votre site vous prônez des méthodes d’éducation très différentes de celles que l’on a l’habitude de voir (et de pratiquer), aussi comment définiriez-vous la vision éducative que vous prônez ? Quels en sont les principes-clefs ?
L’éducation que je mets en avant sur le blog est assez large. Je dirais qu’il y a quatre grands principes, qui d’ailleurs s’inscrivent aussi dans le courant de l’éducation positive et bienveillante:
- Le premier et l’essentiel : « Parler à nos enfants, comme nous aimerions qu’ils nous parlent». Car finalement, ce que nos enfants apprennent de nous est avant tout par mimétisme. Soyons leurs premiers modèles, en les respectant, comme nous aimerions qu’ils respectent les autres.
- Un autre point fondamental, c’est que l’éducation ne consiste pas à dominer son enfant, mais à l’influencer. Etre dans une relation de “soumission” à une autorité, parfois synonyme de conflit avec son enfant, n’apporte que du négatif. Faire « payer » à son enfant ses fautes, ne le rendra pas meilleur. C’est en croyant en lui, qu’on l’incite à donner le meilleur de lui-même.
“[Il faut] parler à nos enfants, comme nous aimerions qu’ils nous parlent [car]ce que nos enfants apprennent de nous est avant tout par mimétisme. Soyons leurs premiers modèles, en les respectant, comme nous aimerions qu’ils respectent les autres.”
- Un autre de mes principes clefs défendu sur le blog est qu’en tant que parent l’objectif n’est pas de se rendre indispensable, mais de faire des enfants responsables. Finalement l’aider à faire tout ce qu’il est en mesure de faire lui-même, même de manière imparfaite, ce n’est pas forcément lui rendre service…
- Enfin, un sujet dont on entend peu parler, mais qui est la signature de mon blog : Cool Parents Make Happy Kids, c’est : pour avoir des enfants heureux, il faut avant tout être des parents épanouis. Ne nous sacrifions pas ; notre bien-être est tout aussi important que le leur. Il est même indispensable pour parvenir à gérer nos enfants avec humour et positivisme !
D’où vous est venue cette envie d’appliquer dans l’éducation de vos enfants ces principes et vous-êtes-vous inspiré de méthodes déjà élaborées par des professionnels ou est-ce plus intuitif ?
Lorsque mon aînée est née et a commencé à grandir j’ai appliqué de façon inconsciente ce type d’éducation. Puis j’ai lu des livres sur le sujet et je retrouvais mes convictions à chacune des pages. Convaincue des bienfaits de cette éducation, je trouvais important de rendre cette pratique connue de tous et accessible à tous. J’ai donc décidé d’écrire un blog afin d’aider les parents à appliquer ces principes dans un quotidien qui ne se passe pas toujours comme dans les bouquins. Et je continue d’en lire, afin de m’assurer de mes propos.
Que répondez-vous à ceux qui éduquent leurs enfants “durement” en se disant que c’est pour mieux les préparer à la dureté de la vie elle-même ?
Éduquer un enfant « durement » en fera un adulte qui sera à son tour « dur ». Les dernières recherches en neuroscience montrent que les enfants apprennent avant tout par mimétisme. C’est-à-dire qu’un enfant pour qui on n’a eu aucune empathie, a peu de chance d’en avoir pour les autres. Cela explique aussi pourquoi un enfant battu a aussi beaucoup plus de chance de battre son enfant à son tour. Un enfant dont les parents sont en conflit quotidien avec lui ou autour de lui, aura plus de chance d’avoir à son tour des relations conflictuelles avec ses proches et son conjoint et de leur parler parfois avec la même agressivité que ses parents ont employé avec lui. En revanche, si l’enfant est plutôt de nature malléable, il apprendra plus facilement à se soumettre au pouvoir de ses parents, mais cela veut aussi dire pour plus tard, qu’il pourra tout simplement avoir des difficultés à dire « non » à ceux qui voudront lui imposer de faire ce qu’il ne veut pas faire. Bien sûr tout ceci est très schématique, et la personnalité joue beaucoup heureusement ! Mais être dur dans un monde dur, c’est l’escalade de la violence.
“Éduquer un enfant « durement » en fera un adulte qui sera à son tour « dur ». […] Un enfant dont les parents sont en conflit quotidien […] aura plus de chance d’avoir à son tour des relations conflictuelles avec ses proches et son conjoint et de leur parler parfois avec la même agressivité que ses parents ont employé avec lui.”
A contrario, l’éducation positive, renforce l’estime que l’enfant a de lui-même, et son empathie envers les autres. Confiance en soi, empathie sont de belles forces pour affronter la vie.
Votre façon de concevoir l’éducation parvient-elle à donner des limites aux enfants ? Beaucoup pensent que les nouveaux parents ont justement tendance à être trop laxistes et donc à former des générations d’enfants rois, que leur répondez-vous ?
L’éducation positive ne prône pas le laxisme, mais l’art de dire « non » avec tact et bienveillance, en respectant l’enfant comme nous respecterions un ami, sans pour autant tout accepter. L’objectif est de donner aux parents des outils pour arriver à leurs buts mais avec moins de conflits.
Quant aux « enfants rois », ce sont pour moi des enfants pour lesquels les parents font passer le bien être de l’enfant, avant le leur. Ainsi l’enfant pense que son bien être est plus important que celui des autres.
“Quant aux « enfants rois », ce sont pour moi des enfants pour lesquels les parents font passer le bien être de l’enfant, avant le leur. Ainsi l’enfant pense que son bien être est plus important que celui des autres.”
Se « sacrifier » pour son enfant est exactement le contraire du 4ème principe cité plus haut. C’est d’ailleurs le succès d’un article qui vantait le sacrifice d’une mère ( Maman il y a quelqu’un qui a besoin de toi) qui m’a décidé à commencer à écrire, car être parent ce n’est pas se sacrifier pour ses enfants.
Notre bien-être est aussi important que le leur, et donc cela crée inévitablement des limites (ex : « Tu n’es pas obligé de dormir, mais tu restes dans ton lit, car là c’est le moment des parents).
Que pensez-vous d’émissions comme “Super Nanny” durant lesquelles les “nanny” répètent régulièrement “- -Tu ne peux pas faire ce que tu veux”, ” – Je me fiche que tu pleures” ?
J’ai eu l’occasion d’en regarder plusieurs. Notamment un où les parents punissaient leur enfant environ dix fois par jour (dont le petit qui marchait mais ne parlait pas) et « Super Nanny » les aida à les punir encore plus fermement. C’est sûr que quand c’est une personne extérieure qui vous parle fermement, vous obéissez beaucoup plus facilement que quand c’est vos parents. Puis quand elle laissa la famille quelques jours seule, le papa a pris son rôle de « ne surtout rien lâcher » à cœur. Et quand le petit garçon a demandé super gentiment s’il pouvait mettre son pull dans l’ascenseur, il s’est pris un vent d’agressivité par son père. Même refus quand l’enfant a gentiment demandé s’il pouvait pousser la poussette avec sa sœur. J’ai été très touchée devant cette escalade de violence. La vie de famille ne doit pas être une lutte quotidienne.
“…les remarques du genre « – Tu ne peux pas faire ce que tu veux », même si c’est vrai, ne devraient pas être exprimées avec ce ton puisque l’on n’admettrait pas que nos enfants l’utilisent à leur tour.”
Cependant, il y a aussi des choses très bonnes dans ce que fait « Super Nanny », et qui rend la maison plus paisible. Par exemple, elle pousse les parents à prendre des moments pour eux, elle organise des sorties en famille, elle invite ceux qui ont des conflits à se parler et elle dit parfois aux enfants qu’elle croit en eux, etc. En revanche toutes les remarques du genre « – Tu ne peux pas faire ce que tu veux », même si c’est vrai, ne devraient pas être exprimées avec ce ton puisque l’on n’admettrait pas que nos enfants l’utilisent à leur tour.
Quels résultats concrets arrivez-vous à obtenir avec cette nouvelle façon de concevoir l’éducation ? (côté enfant et côté parents)
Les parents qui ont commencé à mettre en pratique cette éducation et ne la pratiquaient pas avant, sont unanimes, pour dire qu’ils ont retrouvé un quotidien, moins conflictuel et plus joyeux. Les enfants sont davantage dans une relation de confiance avec leurs parents. Il y a plus d’échanges, d’écoute, les enfants expriment plus facilement leurs sentiments. En revanche, cette éducation ne fait pas des enfants « obéissants », dans le sens d’obéir pour obéir, mais plutôt des enfants « coopérants », dans le but de faire plaisir aux autres, ou de ne pas les déranger.
“Les parents qui ont commencé à mettre en pratique cette éducation et ne la pratiquaient pas avant, sont unanimes, pour dire qu’ils ont retrouvé un quotidien, moins conflictuel et plus joyeux. […] cette éducation ne fait pas des enfants « obéissants », dans le sens d’obéir pour obéir, mais plutôt des enfants « coopérants »”
Je vous invite à faire un test dans votre entourage. Prenez trois de vos amis parmi les personnes les plus douces que vous connaissez et qui ne cherchent pas le conflit (ni avec un automobiliste qui leur grille la priorité, ni avec leur entourage, ni avec leur conjoint, ni avec leur enfant) puis demandez-leur comment ils ont été éduqués. Jusqu’à présent je n’ai trouvé que des personnes dont au moins l’un des parents prônait une éducation douce et sans punition.
En revanche, le tempérament des enfants jouent aussi, donc l’inverse n’est pas vrai, et on n’obtient pas toujours ces résultats avec une éducation positive.
Vous retrouvez Charlotte et ses conseils en parentalité positive sur Cool Parents Make Happy Kids 🙂
Et vous, avez-vous éduqué vos enfants avec ce type de parentalité et si oui pour quels effets ?
Ou alors vous n’êtes pas d’accord avec ce type d’éducation ?
Dites-nous tout !
Sympa cette interview, je garde ça dans un coin de ma tête le jour où…
🙂
Excellent sujet, comme d’habitude… Merci à toi.
J’ai été en désaccord pendant une bonne dizaine d’années avec famille et amis sur ma pratique éducative basée sur le dialogue, l’amour, l’explication et l’implication. Je ne faisais pourtant aucun prosélytisme, je fonctionnais à l’intuition, mais certains, parmi les moins diplomates ont effectivement employé le mot laxisme qui me paraissait bien fort.
J’avais opté pour seule limite à sa liberté le respect, au sens large (de l’autre, de lui-même, de la vie, des opinions, …). J’ai fait un gros travail sur moi-même pour bannir la violence dans mes gestes mais aussi dans mes paroles, là où elle fait parfois tout autant de dégâts.
Aujourd’hui, il a bientôt 15 ans et traverse l’adolescence avec la particularité liée à cette période, il aura sûrement beaucoup de choses à apprendre et à corriger, comme tout le monde, mais il est fondamentalement pacifique, tolérant et humble. Nous avons des échanges intéressants et sincères, et surtout les « opposants » d’hier reconnaissent ses qualités humaines d’une part, sa présence agréable et même une espèce de «maturité ». Certains ont même osé un : « Finalement, … ».
Ce n’est qu’un témoignage qui vaut ce qu’il vaut mais j’en tire une profonde joie pour lui et son avenir.
Je suis donc en phase avec toute méthode qui croit aux vertus de l’amour offert et transmis, à l’éveil précoce de la responsabilité personnelle, et à l’importance de la confiance. J’adhère à cette ambition d’enfants plus « coopérants » qu’ « obéissants », c’est à mon avis la seule chance pour sortir le monde de sa bassesse vibratoire actuelle.
« L’éducation ne consiste pas à couper les ailes, mais à guider le vol » – Anonyme
Merci Fabien, décidément si j’ai un jour besoin de me regonfler le moral je viendrais te chercher ! :-p
Super que tu puisses nous fournir ton témoignage avec quinze années de recul, je pense aussi qu’il est évident que c’est la bonne voie mais que comme tout chemin les bords en sont flous et que la limite peut-être ténue entre laxisme et écoute, limites et tyrannie. Concrètement par exemple tu faisais quoi s’il faisait une crise ou exigeait ?
Station de gonflage … de moral, super ! Moi qui cherchait un nom pour un futur lieu de retraites. Merci.
Ce que je faisais ? Comme on m’a enseigné à l’école des bisounours : de l’amour et encore de l’amour.
1 – Si le cadre du respect était dépassé, une sanction classique, simple, proportionnée, éducative (expliquée), appliquée sans colère, sans jugement de valeur, rancune ou chantage affectif surtout, avec possibilité de « réparation ». Exemple : tu es privé de sortie pendant 2 jours (classique quoi !), sauf demain matin car untel compte sur nous et ce serait un manque de respect de lui faire supporter ça (pour rebondir sur notre « pacte »). Si tu veux, on peut en reparler, je suis là (toujours une porte ouverte…) et je t’aime aussi quand tu fais mauvaise route.
2 – Sinon, sans manque de respect, dédramatisation, indifférence ou humour selon le cas et mon propre état d’esprit, puis dialogue avec de la bienveillance dans les yeux et l’attitude. Exemple : je ne suis pas d’accord avec toi parce ….. (avec objectivité !), mais à la limite tu es libre de choisir ça et d’en assumer les conséquences. Bon courage.
Bien sûr, tout ça est du « coup par coup » et on affine, on progresse en même temps que son enfant (car on ne devient pas parent par hasard…)
Il me semble en général que (et cela ne s’applique pas qu’avec les enfants à mon avis) :
– Le calme et la bienveillance désamorcent assez rapidement une bonne partie des problèmes avec un minimum de patience.
– Il est extrêmement important de ne jamais dévaloriser son enfant (même pour plaisanter)
– Le dialogue « intelligent » et une confiance établie sur la durée font émerger assez naturellement des solutions et autres prises de conscience qui n’attendaient que ça.
– Enfin (et là étape à zapper pour les plus matérialistes), mon cheminement personnel me fait voir la parentalité comme une noble mission auprès d’une âme « confiée », alors je demande une guidance intérieure, un soutien pour gérer le conflit avec perspicacité. Et amour (mais ça j’ai déjà dit).
Il est évident que la personnalité de l’enfant intervient mais je témoigne avec mon expérience limitée. Il est aussi évident que je livre une version débarrassée des fois où j’ai été à côté de la plaque, avec des mots qui dépassent ma pensée, et des manques de lucidité, mais jamais, jamais de violence. Jamais.
Une dernière chose et après je parle plus jamais de moi (en même temps tu m’as tendu la perche !) : il n’est pas honteux de s’excuser, même devant un enfant (j’ai peur que cette évidence ne le soit pas toujours…).
Merci donc à toi Ô station de gonflage pour ta réponse, j’espère que Charlotte sera aussi intéressée par la réponse et que vous avez pris contact 🙂
Bonjour Fabien,
Un grand merci de ton témoignage. D’ailleurs j’ai comme projet d’interviewer des personnes ayant reçu une éducation plutôt positive, ou qui l’ont pratiquée avec leur enfant maintenant grand, afin de mieux communiquer sur les résultats de ce type d’éducation. Je serai ravie le jour venu de pouvoir vous interviewer. Pourrez-vous me transmettre votre mail ? contact@coolparentsmakehappykids.com
1000 merci à vous, et belle journée
Complètement d accord avec Charlotte!
Un parent bienveillant ne veut pas dire parent laxiste au contraire.
J essayerai d appliquer ces préceptes meme si ce n est pas toujours facile
Salut Monica 🙂
Et de ton côté avec la petite ça marche, tu as de bon retours concrets ?